
Carlo Foppa Éthicien
Je crois franchement avoir abouti à la philosophie par élimination…. A la Faculté des lettres de Genève, on avait le choix entre trois branches dont une était la principale. Je pense avoir changé au moins deux ou trois fois en cours d’études pour enfin élire la philosophie au sommet du hit parade.
Sachant que, de manière générale (et plus particulièrement pour les humanistes), les études universitaires mènent tout droit au chômage, je me disais qu’au moins j’aurais pu me délecter l’esprit avec une bonne gymnastique intellectuelle, absolument inutile et donc indispensable.
Après un parcours assez standard, licence à l’université de Genève, Diplôme d’Etudes Approfondies à Paris et un PhD à l’Université Laval, j’ai baigné quelques années dans le cirque académique : enseignement en médecine et en philo, congrès, publications, colloques, cela manquait un peu d’action…
Mais le fait d’avoir choisi l’éthique pratique dans mes spécialisations (le livre de Peter Singer, Practical Ethics fut déterminant) n’était pas anodin. Au fond il fallait bien en faire quelque chose de toutes ces élucubrations théoriques!
Un jour, un ami québécois – à qui je serai toujours reconnaissant (et qui n’est pas innocent par rapport à la rédaction de ces lignes…) – m’a demandé ouvertement ce que j’aurais aimé faire concrètement ; de l’éthique appliquée, évidemment!
Me voilà depuis maintenant 17 ans que je fais le consultant en éthique dans le milieu des soins : d’abord 12 ans dans un hôpital universitaire et ensuite, depuis 5 ans, dans des résidences pour personnes âgées, des hôpitaux périphériques, et surtout dans le domaine des soins à domicile. On s’imagine, à tort, que les dilemmes éthiques se présentent prioritairement dans la pratique de la médecine de pointe…
J’ignore sincèrement dans quelle mesure les délibérations éthiques (sorte de maïeutique) constituent un exercice de philosophie morale appliquée, mais elles ressemblent beaucoup aux argumentations lues dans les livres de mes études passées. Le plus intéressant est le fait que, d’une part, les situations sont bien réelles (et donc appellent une réponse), et que, d’autre part, lorsqu’une solution est trouvée, les équipes et/ou les patients expriment leur gratitude. On a ainsi l’impression que la philosophie peut aider concrètement nos semblables sans forcément appliquer au pied de la lettre les Fondements de la métaphysique des mœurs…
J’aimerais ici remercier quatre personnes qui ont profondément marqué mon cheminement professionnel.
Tout d’abord Mme Anne Fagot-Largeault, Professeure au Collège de France qui m’a suivi tout au long de ma formation doctorale. Ensuite Mme Marie-Hélène Parizeau, Professeure à l’Université Laval, ancienne élève également d’Anne Fagot-Largeault et qui a eu le courage de codiriger avec elle sa première thèse (la mienne sur Hans Jonas).
M. Luc Bégin, Professeur à l’Université Laval et membre de mon jury de thèse avec qui on a noué un lien de sincère amitié ; et c’est bien lui qui me posa la question sur mon avenir…
Et enfin le Dr Jacques Cotting, Médecin responsable des soins intensifs (réanimation) de pédiatrie au Centre Hospitalier Universitaire Vaudois (pour son humanité, son intégrité et son obstination) qui m’a permis de faire mes premier pas dans l’hôpital, dans un service pas tout à fait comme les autres….