
Philosophie esthétique – La beauté d’autrui
PRÉSENTATION DE LA RÉFLEXION
La philosophie esthétique porte sur une de nos expériences les plus intuitives et les plus universelles : celle du « beau » et du « laid ».
Quand cette expérience est vécue à la vue d’un être humain, elle est souvent liée à l’amour et à la haine. Pour aimer une personne, au fond, il faut trouver qu’elle est « belle ». Pareillement, haïr quelqu’un signifie que l’on voit du « laid » chez lui.
L’appréciation esthétique d’autrui n’est toutefois pas qu’une question d’apparences. Plusieurs autres éléments influencent notre expérience, par exemple la personnalité, le dynamisme ou l’intelligence de la personne qui est devant nous.
Ce constat ne date pas d’hier. Socrate était physiquement très laid, dit-on, ce qui n’a pas empêché de jeunes grecs comme Alcibiade de le trouver très beau, puisqu’ils étaient attirés par « la beauté de son âme ».
Mais jusqu’où peut-on nier l’importance du physique ou du « visible » dans la beauté qu’un individu dégage?
Entre eux, la plupart des gens s’entendent pour dire que l’apparence joue un rôle important dans l’appréciation esthétique des autres. Publiquement, cette idée dérange en raison de l’injustice qu’elle implique envers les moins fortunés physiquement. C’est peut-être pour cette raison que, étant jeunes, plusieurs d’entre nous ont eu droit à un discours qui allait presque jusqu’à nier l’importance du physique dans le phénomène qu’est l’amour.
Heureusement, tout le monde ne possède pas les mêmes critères de beauté et n’accorde pas la même importance à l’apparence. En fait, l’importance qu’une personne accorde à son image est un critère de beauté en soi.
Ainsi, une personne qui accorde peu d’importance aux apparences physiques pourra trouver « laide » une personne qui prend extrêmement soin d’elle, simplement parce qu’elle prend « trop » soin d’elle selon ses valeurs. Inversement, dans les cercles sociaux où l’apparence est cruciale, on sera tenté de porter un jugement négatif sur les groupes où elle est négligée.
Ce constat laisse entendre qu’il y aurait différents « types » de beautés. Au fond, les couples amoureux sont souvent formés de personnes qui suivent une mode vestimentaire relativement semblable, et il n’est pas rare qu’une même personne puisse être jugée divinement belle par un et plutôt moche par l’autre.
Peut-on affirmer pour autant que la beauté est uniquement « dans l’œil de celui qui la regarde »? Si l’on présentait à un groupe une personne défigurée dont la peau est parsemée de gales, puis qu’on leur présentait une personne en santé et resplendissante, la majorité préférerait sans doute leur seconde expérience esthétique. Même sans tomber dans les extrêmes comme l’exemple précédent, il n’est pas rare qu’un consensus émerge quant à la beauté ou à la laideur d’une personne.
Cela signifie-t-il qu’il pourrait exister, quelque part, une échelle objective de la beauté? Nie-t-on la possibilité d’une telle échelle simplement pour respecter les moins fortunés sur le plan de l’apparence physique, c’est-à-dire par souci moral? Ou est-ce plutôt parce qu’elle est impossible?
Ce qui complexifie le problème, c’est qu’en réalité, il est possible de trouver une même personne très belle à un moment précis, mais très ordinaire à un autre. Par exemple, les moments de joie ou de passion ont tendance à « dégager plus de beauté » que les moments quotidiens, disons lorsque nous marchons d’un lieu à un autre. Quand nous regardons quelqu’un d’autre, notre expérience esthétique dépend donc bien plus que de ses caractéristiques physiques et même psychologiques.
Questions pour inspirer la réflexion
Existe-t-il des critères objectifs de beauté?
Si oui, peut-on départager la part d’objectivité et de subjectivité dans l’appréciation esthétique?
Dans quelle mesure la beauté physique peut-elle être séparée de la beauté de « l’âme »?
Est-ce que certains types de personnalité ont tendance à adopter une mode vestimentaire précise plutôt qu’une autre?
L’expérience de la beauté est-elle essentiellement une question de « momentum »?
Quand on suppose qu’une personne est « superficielle », qu’affirme-t-on au juste?
Lorsqu’on expérimente la beauté d’une personne, d’un tableau, d’un film, d’une idée, d’un livre, d’un événement, s’agit-il d’une seule et même expérience, ou y a-t-il plusieurs types d’expérience de la beauté? S’il y en a plusieurs, comment pourrait-on les catégoriser?
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